La Fusion |
II -La fusion source d'énergie . III -Le plasma thermonucléaire. VI - Les dispositifs de confinement. |
La fusion thermonucléaire (Sources EDF)
Dans les noyaux des atomes, les protons portent des
charges positives et devraient donc se repousser. Or, ils restent soudés. Des
forces nucléaires (interactions forte et faible) assurent la cohésion du
noyau.
La masse d'un noyau est inférieure à la somme des
masses de ses constituants pris isolément. Cette différence, le défaut de
masse, correspond d'après la formule d'Einstein E =
m c2 à l'énergie de liaison qu'il faudrait fournir au
noyau pour le dissocier en nucléons séparés.
Le diagramme "énergie de liaison par nucléon"
donne l'énergie de liaison moyenne par nucléon, en fonction du nombre de
masse de chacun des éléments considérés en abscisse.
La différence d'énergie de liaison entre les noyaux
d'uranium et les noyaux situés au niveau maximum de la courbe correspond à
l'énergie de fission, utilisée dans les centrales nucléaires.
La partie gauche de la courbe fait apparaître la
possibilité de produire de l'énergie, par fusion
nucléaire, lors de la formation, à partir de deux noyaux légers, d'un
noyau plus lourd.
Plusieurs réactions de fusion sont envisageables. La
plus réalisable est la réaction deutérium – tritium (deux isotopes de
l'hydrogène). Elle consiste à précipiter l'un contre l'autre un noyau de
deutérium (un proton et un neutron) et un noyau de tritium (un proton et deux
neutrons). Les deux noyaux fusionnent pour former un noyau d'hélium (deux
protons, deux neutrons). La réaction s'accompagne de l'expulsion d'un neutron
et d'une libération d'énergie d'environ 17,6 MeV.
L'eau contient 40 mg de deutérium par litre. Le
tritium peut être obtenu en bombardant des noyaux de lithium avec des
neutrons. On pourra utiliser à cet effet les neutrons produits dans les réactions
de fusion.
La quantité d'énergie qui sera ainsi produite par
un gramme de mélange deutérium-tritium est équivalente à celle que dégage
la combustion.de 10 000 litres de pétrole.
Pour une même quantité d'énergie produite, la
fusion engendre bien moins de produits radioactifs que la fission.
Le deutérium, le lithium et l'hélium ne sont pas
radioactifs. Le tritium l'est, mais les quantités mises en jeu sont limitées.
On prévoit de le produire à l'intérieur même du réacteur, et de
l'utiliser en circuit fermé.
II n'y a pas de produits de fission. En revanche,
l'absorption des neutrons par les parois du réacteur activera celles-ci
.
ÉNERGIE
DE LIAISON PAR NUCLÉON |
SCHÉMA DE PRINCIPE D'UN RÉACTEUR DE FUSION |
Un réacteur de fusion pourrait être composé d'un
"cœur" où se produirait la réaction nucléaire, entouré d'une
enveloppe ou "couverture" destinée à la production du tritium et
aussi à la récupération de l’énergie produite, sous forme d'énergie
thermique. Cet ensemble doit être enfermé dans une enceinte de protection
pour confiner la radioactivité.
L'énergie thermique produite pourrait être
transformée ensuite en électricité selon un processus classique.
Dans les réactions de fission, les neutrons qui ne
portent pas de charge électrique interagissent avec les noyaux sans être
repoussés par la charge positive de ceux‑ci.
Dans les réactions de fusion, les noyaux en
interaction possèdent des charges électriques de même signe qui se
repoussent.
Pour vaincre la répulsion électrostatique, les
noyaux doivent avoir une vitesse suffisante pour que les collisions soient
possibles. L'agitation thermique moyenne à 500 millions de degrés correspond
à la vitesse nécessaire pour la fusion deutérium ‑ tritium. Les
atomes sont alors à l'état de plasma: ils se séparent de leur cortège électronique.
On obtient un nuage de particules chargées, positivement pour les noyaux et négativement
pour les électrons, l'ensemble étant globalement neutre.
Si la température moyenne du plasma est de l'ordre
de 100 millions de degrés, la réaction de fusion est possible car une
proportion suffisante de noyaux atteint la vitesse minimale nécessaire.
Pour que le bilan énergétique de la réaction de
fusion soit positif, le plasma doit avoir une température et une densité
suffisantes (nombre de noyaux par cm3). Les réactions de fusion
doivent être assez nombreuses et libérer plus d'énergie qu'il n'en faut
pour maintenir la température du plasma et compenser les pertes par
rayonnement.
Les conditions nécessaires à l'obtention de la réaction
de fusion doivent être maintenues au minimum un certain temps, appelé temps
de confinement, fonction de la température et de la densité du plasma.
Ainsi, pour une réaction deutérium‑tritium,
et pour une température moyenne du plasma d'environ 100 millions de degrés,
le produit de la densité du plasma par le temps de confinement doit être de:
1014 (secondes x nombre de noyaux par cm3).
Ces
conditions constituent le critère de Lawson, du nom du physicien
britannique qui les a le premier mises en évidence dès 1957. Si le critère est satisfait, l'énergie cinétique
des particules qui naissent lors de la réaction de fusion accroît
l'agitation globale du plasma et augmente sa température. De
nouvelles fusions se produisent et le processus est entretenu. |
Tokamak du centre de recherche de Fontenay – aux - Roses. |
Pour
éviter la dispersion du plasma par diffusion, il est nécessaire de
le confiner. Deux méthodes sont à l'étude. Le
confinement inertiel consiste à faire converger des faisceaux
laser ou des faisceaux de particules (ions ou électrons) très
puissants sur un mélange deutérium ‑ tritium de forme sphérique.
Les couches de surface de la sphère subissent un échauffement
intense qui, par réaction, comprime la région centrale de la sphère. A
l'intérieur de celle-ci, la température due à la compression
atteint un niveau suffisant pour permettre la fusion des noyaux de
deutérium et de tritium. La
seconde méthode est celle du confinement
magnétique d'un plasma de faible densité, de l'ordre de 1013
à 1016 noyaux par cm3. Pour
le réaliser, on utilise la propriété des particules chargées qui
constituent le plasma de s'enrouler en hélice autour des lignes de
force d'un champ magnétique : si l'on donne à celui-ci la
configuration d'un tore où les lignes de force se referment sur
elles-mêmes, les particules sont "piégées" et le plasma
reste confiné. Le
chauffage initial du plasma est obtenu par compression, par injection
d'atomes neutres de haute énergie ou par l'utilisation d'ondes haute
fréquence. Les
impuretés provenant, par exemple, du dégazage des parois, doivent être
évitées en raison des pertes d'énergie qu'elles entraînent. |
Image
du rayonnement X produit dans le cadre d’une expérience de fusion
laser, réalisée sur un microballon de verre contenant un mélange
deutérium – tritium. |
Les
dispositifs de confinement
Depuis
trente ans, des efforts importants ont été consacrés aux recherches
sur la mise en oeuvre de la fusion contrôlée. Jusqu'à présent, le
critère de Lawson n'a pas été satisfait : les réactions obtenues
ne dégagent pas encore suffisamment d'énergie pour s'entretenir
elles-mêmes. Parmi
les dispositifs réalisés, le Tokamak
qui met en oeuvre le principe du confinement magnétique du plasma
semble le plus prometteur. Une
chambre métallique étanche en forme d'anneau (tore) renferme le deutérium
et le tritium. Le plasma y est formé, confiné et chauffé. Un noyau
de tôle magnétique traverse le tore. Il porte des bobines
inductrices qui font circuler dans le plasma un courant qui le chauffe
par effet Joule. D'autres
bobines créent les champs magnétiques qui empêchent tout contact
entre le plasma et les parois : des bobines de "champ toroïdal"
guident le plasma autour de l'axe du tore, et des bobines de
"champ poloïdal" assurent sa stabilité. |
Tokamak
|
Le Stellarator est un appareil
de conception voisine de celle du Tokamak. La principale différence réside
dans la façon de faire circuler le plasma pour le stabiliser: dans le
Tokamak, cette circulation est produite par la composante du champ magnétique
due au courant induit dans le plasma ; dans le Stellarator, le champ magnétique
est créé par des enroulements d'aimants extérieurs au plasma.
Le programme européen de
fusion contrôlée
Les
recherches en matière de fusion contrôlée par confinement magnétique
sont menées par les pays de la CEE de façon coordonnée depuis la création
de l'EURATOM en 1957. Elles s'effectuent à la fois dans le cadre de
contrats d'association entre les différents organismes de recherche
nationaux (le Commissariat à l'Énergie Atomique pour la France) et
la Commission des Communautés européennes, et dans le cadre de
l'entreprise commune JET (Joint European Torus). Le
JET est le plus grand Tokamak actuellement en service dans le monde.
Il est installé à Culham, en Grande-Bretagne, et fonctionne depuis
1983. Son objectif est d'étudier le plasma dans des conditions
voisines de celles d'un réacteur de fusion. Le
JET est financé à 80% par EURATOM, à 10% par l'Atomic Energy
Authority (GB) et à 10% par les organismes nationaux associés. Parallèlement
au JET, le programme TORE
SUPRA, réalisé dans le cadre de l'Association EURATOM‑CEA,
permet d'améliorer les connaissances dans les domaines de la physique
nucléaire et de la technologie des Tokamaks. Mis
en service en 1988 à Cadarache dans le midi de la France, TORE SUPRA
est le seul grand Tokamak en fonctionnement disposant d'un aimant toroïdal
supraconducteur. D'autres
centres de recherche existent en Europe: en RFA à Garching et à Jülich
; en Italie à Padoue et à Frescati. Le
successeur du JET, le NET (Next European Torus), en projet depuis
1983, devrait permettre de confirmer la faisabilité scientifique et
technologique de la fusion. A
plus long terme, l'objectif du programme communautaire de fusion est
la construction d'un réacteur de démonstration, DEMO, qui devra prouver son aptitude à produire de l'électricité
dans des conditions satisfaisantes. |
température : 30 millions de degrés durée de confinement 15 s. |
Trois
autres pays mènent d'actives recherches dans le domaine de la fusion : Les États-Unis,
l'Union soviétique et le Japon.
Tous
trois se sont associés avec la CEE et sous l'égide de l'Agence
internationale de l'énergie atomique, pour définir un avant-projet
international de réacteur thermonucléaire expérimental (ITER).
Le
saviez- vous ?
Le
plasma, quatrième état de la matière, est de loin le plus répandu dans
l'univers. Certains physiciens estiment qu'il constitue plus de 99% de la matière.
Le
Tokamak est une abréviation de trois mots russes : Tok (courant), Kamera
(chambre.) et Mak (magnétique). Le Tokamak a été imaginé vers 1950 par les
physiciens soviétiques Tarmon et Sakharov.